Déménager, oui mais pourquoi ?

par Manon LIDUENA

Cet été, nous nous sommes retrouvés coincés dans la cage d’escalier, deux étagères sous chaque bras et le nerf sciatique qui joue du violon. Cet été, nous avons déménagé notre agence. Et, au cœur de l’action, une goutte de sueur roulant sur la tempe, on s’est reposé cette question : Pourquoi ? Mais, pourquoi déménage-t-on déjà ?

Pour s’agrandir et valoriser son travail

Le temps est venu d’arrêter de mener ses réunions entre la machine à café et le frigo, de partager son bureau avec le collègue en Birkenstock, ou stocker toutes nos archives en carton au sous-sol. En 2021, nous déployons nos ailes et nous nous offrons le luxe des grands espaces.

C’est notre pari, mais c’est aussi celui du Grand Musée Egyptien (nous assumons la comparaison) dont la construction s’achève en 2021, à 3 km des pyramides de Gizeh. Ce projet évidemment pharaonique mené par le cabinet d’architecture Heneghan-Peng a permis de rassembler la grande majorité des collections du Musée égyptien du Caire, mais aussi d’autres sites égyptiens en un seul lieu, à la hauteur de ces trésors. Le Grand Musée Egyptien, dont l’ouverture est prévue pour la fin d’année deviendra alors la plus grande collection d’antiquités égyptiennes du monde (1). Du côté d’Oslo aussi, on est en pleine effervescence, avec la très prochaine ouverture du Munch Museet, imaginé par le cabinet d’architecture Estudio Herreros (2). Ce nouveau bâtiment, « qui s’incline respectueusement vers le ciel », vient remplacer l’ancien musée, construit en 1962 dans un autre quartier d’Oslo, afin de présenter plus largement l’œuvre du peintre.

Pour s’installer sur un meilleur spot

Parce qu’une vue sur mer, c’est quand même plus sympa qu’une vue sur mur. Tout simplement. Ou parce que le site actuel n’est plus adapté (satané changement climatique). C’est le cas des Temples d’Abu Simbel, construits au XIIIe siècle avant J.-C. (et avant le BIM) sur les rives du Nil. Avec la construction des barrages dans les années 1950, les édifices se sont retrouvés menacés par la montée des eaux, l’Unesco a donc organisé leur déplacement 60 mètres plus loin, sur une colline artificielle – un extraordinaire chantier de quatre ans pendant lesquels 1036 blocs de 10 à 15 tonnes chacun furent déplacés (3). Un déménagement de l’ordre du sauvetage, qui nous évoque une autre raison de déménager ….

Parce qu’on est au milieu de la piste !

Comme cette école primaire à Shanghai (Chine), immeuble de cinq étages, déplacé sur 62 mètres grâce à des vérins hydrauliques, qui se trouvait sur le site d’un futur centre commercial. Une façon plutôt audacieuse de conserver le patrimoine architectural (l’école date de 1935) (3).

A San Francisco, une opération similaire vient d’être menée, à plus petite échelle, « juste » une maison victorienne de 139 ans, mais cette fois déplacée sur tout un pâté de maisons en camion (4).

Et pour Archivolto, comment ça se passe ?

Nous revoilà dans notre cage d’escalier, à nous poser toutes ces questions métaphysiques sur le pourquoi de notre nerf sciatique. Et puis, c’est l’illumination : nous avons déménagé dans cette nouvelle agence parce qu’elle nous correspond. Nous l’avons intégralement conçue à notre manière, selon nos valeurs, nos besoins et notre identité. Nous avons décloisonné les espaces, pour faciliter les échanges et booster la créativité. Chacun est libre d’ajouter sa touche perso dans son bureau, la photo du chien, la sculpture en pâte à sel de l’enfant. Et puis nous avons impliqué toute l’équipe dans le déménagement. Ce qui crée des liens, forcément, et qui permet aussi à chacun de savoir où est quoi (les archives, les recharges de café). Et enfin, notre petite victoire, c’est d’avoir convaincu tout le monde que la dématérialisation était la clé, afin que notre déménagement ne ressemble pas à ça :

Nous sommes désormais au 11 rue Paul Bert, toujours à Lorient, nous y sommes bien, et nous sommes ravis d’avoir entrepris ce -long- déménagement. Finalement, un nerf sciatique, ce n’est pas indispensable non ?

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