Exploration Architecturale

Volet n°4 : Villa Cavrois
LE COURIAUT Hugo

Dans le cadre de notre série dédiée aux demeures emblématiques, actuellement partagée sur nos réseaux sociaux, explorez les détails captivants de cette réalisation exceptionnelle signée par l’architecte Robert Mallet-Stevens.

L’histoire de la villa

Au début du XXe, la région de Roubaisienne est connue comme point névralgique de l’industrie française. Dans ce contexte, Paul Cavrois décide de faire construire pour sa famille sa future villa.
C’est ainsi que sera mandaté l’architecte novateur Mallet-Stevens afin de travailler sur l’une des maisons les plus iconiques.

Courant 1929, le projet de construction de la villa moderne est confié à R. Mallet avec une entière liberté d’action. La demeure s’érigea alors dans la commune de Croix, là où la bourgeoisie industrielle prenait place en construisant d’imposantes villas néo-régionaliste.

Malheureusement, les archives de l’architecte ayant disparu, il est complexe de déterminer avec exactitude la conception de la villa. Cependant, la construction aurait été inaugurée courant 1932, à l’occasion d’un mariage de l’une des filles de la famille.

Quelques années plus tard, durant la Seconde Guerre Mondiale, la villa se verra occupée par les Allemands et transformée en caserne. Il faudra attendre la libération pour que les Cavrois fassent modifier l’intérieur de la villa par l’architecte P. Barbe afin d’y aménager deux appartements pour les fils de la famille.

Après le décès de madame Cavrois en 85, la propriété est vendue à un promoteur immobilier puis sera abandonnée par la suite. En proie au vandalisme, la bâtisse se dégrade rapidement malgré un classement au titre des monuments historiques en 1990. Il faudra attendre la mobilisation d’une association en 2001 pour que l’État acquière la villa ainsi que la partie centrale du parc.

Suite à cela, d’importants travaux seront engagés de 2012 à 2015 sous la maîtrise d’oeuvre de l’architecte des monuments historiques, Michel Goutal pour un coût évalué à 23 millions d’euros. Pour ce faire, le chantier aura nécessité des recherches historiques et archéologiques pointues.

Il faudra ainsi 13 ans pour restaurer la villa et le parc environnant dans leur état initial. Depuis, la villa est devenue un lieu d’expositions et de discussion autour de l’architecture et fait ainsi rayonner le patrimoine local.

Le design extérieur

R. Mallet imagina la villa comme un véritable château moderne via le dépouillement des volumes, l’absence d’ornement dans le décor, la multiplication des toits terrasses, l’équipement de pointe (chauffage central, téléphonie, heure électrique, ascenseur) ou encore l’utilisation de matériaux et de techniques industrielles (verre, métal, acier).

La façade de la villa s’étend sur 60 m de long, faite de briques jaunes orangées foncées, faisant ainsi contraste avec les habitations alentours. Avec du recul, l’architecture pourrait presque faire penser au mouvement déconstructiviste.

La bâtisse se décompose ainsi ; au rez-de-chaussée, l’espace est séparé entre vestibules, grand salon, bureau et salle à manger, tandis que les étages sont séparés en ailes symétriques pour les parents et les enfants, héritage de la tradition aristocratique du XVIIe siècle.

R. Mallet ne se contente pas de tracer des volumes architecturaux, il crée également le décor intérieur ainsi que les moindres détails des éléments mobiliers. On pourrait parler ici d’oeuvre d’art « totale », car en plus de la villa, la totalité du mobilier est conçue par ce dernier.

Le mobilier

Un choix minutieux fut porté concernant le choix du mobilier, car le décor domestique se doit de refléter la psychologie de ceux qui y évoluent. Pour le coup, son dévolu se jeta sur des exemplaires uniques, imaginés pour leurs usages ainsi que pour l’harmonie générale.

Les meubles nécessitaient de mettre alors en exergue des aspects bien différents des diverses pièces de la villa. En effet, le mobilier et les espaces dévolus aux enfants se distinguent de ceux des parents qui se distinguent également des meubles des domestiques.

Malheureusement, l’acquisition de la demeure par l’état fit se disperser le mobilier. La problématique étant que la villa sans ses meubles n’est plus l’œuvre orignal ? Qui plus est, à sa mort, l’architecte brûla ses archives, complexifiant ainsi d’autant plus le travail de reconstitution du mobilier. Les recherches se sont alors basées sur plusieurs photographies de 1932 et de 1986 afin d’avoir un rendu des plus fidèle de l’intérieur de la bâtisse.

Grâce à une politique d’acquisition des collections Cavrois conduite courant 2009, certains meubles furent restitués.Des dons et des legs permirent aussi à d’autres pièces d’origine de rejoindre la collection de la demeure.

Exemplaires uniques imaginés par l’architecte non seulement pour leur usage, mais leur adéquation à la pièce qui les abrite, les meubles laissent une empreinte spécifique dans chacun des espaces. Le mobilier sublime le travail de matières traditionnelles comme le bois et des matériaux dits industriels, comme les métaux (aluminium ou acier).

Le mobilier et l’architecture doivent permettre de situer l’identité des habitants et de mettre en évidence leur caractère (monsieur, madame, jeunes hommes, jeunes filles) tout en répondant à leur usage spécifique.

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