Replacer l’architecture au cœur des programmes scolaires

par Manon LIDUENA

Nous avons tous été architectes un jour. A une époque bénie, où monter une tour de Kapla relevait de la priorité. Et si elle n’était pas en Kapla, cette tour était forcément en Lego. Vous vous souvenez ? Le tapis de jeu, les innombrables possibilités d’ouvertures, de gabarits, de façades. L’architecture est une mine d’or pour développer la créativité de l’enfant. Il s’y intéresse d’ailleurs de lui-même, au travers de ces jeux intemporels. Pourtant, quand on lit les programmes scolaires, point d’architecture à l’horizon. Ou si peu. De la piscine du centre-ville à la maison des voisins, l’architecture est bien visible de tous, exposée en plein jour, présente dans nos vies au quotidien. Et malgré tout, demandez à un élève de citer un architecte connu. Le résultat est plus qu’aléatoire. Heureusement – pour nous, pour vous et pour les vendeurs de mètres – les initiatives pour pallier ce manque existent. Tour d’horizon.

Les profs à l’ouvrage

Et si on voyait l’architecture comme un outil transversal pour aborder différentes matières ? Appréhension de l’espace, théorèmes géométriques, lois physiques, conscience urbaine et civique, autant de thématiques qui peuvent être illustrées par la construction d’un nouveau bâtiment au sein de l’école comme ici, dans l’Isère, en partenariat avec la Maison de l’architecture locale [1]. Grâce à ce genre d’initiative, la discussion autour de l’espace public peut s’engager, chacun évoquant ses besoins et son quotidien. L’architecture devient une question centrale pour les élèves et leurs parents. En Haute-Normandie, on passe même à la pratique, avec la construction de cabanes, autour de différentes matières [2].

Bien souvent, ces initiatives reposent sur les affinités personnelles des enseignants. Pour universaliser ces démarches éducatives, il faudrait repenser l’intégration de l’architecture dans la formation initiale des enseignants. Une démarche qu’a entamée le CAUE (Conseil d’architecture d’urbanisme et de l’environnement) pendant quelques années. Des ateliers-conférences et des outils pédagogiques ont ainsi été diffusés au sein des ESPE (Ecoles Supérieures du Professorat et de l’Education), afin de sensibiliser les futurs profs à cette matière. [3]

Les archis s’en mêlent

Des architectes et designers prennent aussi les choses en main. A Montréal par exemple, une designer saisit le prétexte d’un nouveau bâtiment en ville pour inviter les élèves à la réflexion au cours d’ateliers. L’idée étant de leur faire prendre conscience de leur environnement, tout en développant leur goût pour l’art et leur sens critique. [4]

En France, le CAUE avait créé entre 2012 et 2016 une école d’architecture, qui proposait des cours hebdomadaires ou des stages pendant les vacances scolaires pour les plus jeunes (6-18 ans). L’objectif était de travailler sur des projets d’aménagement, des constructions éphémères ou des maquettes. Le projet n’a malheureusement pas perduré. Actuellement, la Cité de l’architecture et du Patrimoine à Paris [5] organise des stages et des ateliers pour le jeune public. On y apprend à maquetter sa maison de vacances ou à réaliser une fresque murale. Toutefois, l’impulsion doit venir des parents, ce qui exclut une – grande – partie de la population.

Et si l’on ne va pas à l’architecture, alors il faut qu’elle vienne à nous. « Que fait un architecte, comment travaille-t-il et qu’apporte-t-il à la société en termes de service ? », vaste question à laquelle les Journées Nationales de l’architecture [6] prévoient de répondre, à l’aide de rencontres et d’ateliers pédagogiques à destination des scolaires. Voilà peut-être l’une des pistes les plus accessibles à tous, à explorer les 18, 19 et 20 octobre prochains, partout en France.

Grâce à ces initiatives, nous avançons progressivement vers une meilleure éducation architecturale, qui permettrait d’accompagner les futures générations dans une réflexion plus globale, sur le vivre ensemble et l’inclusion des besoins de chacun.

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